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1 X élu, 3 X transmis

ICI, ON NE CANDIDATE PAS, ON HÉRITE

La démocratie luxembourgeoise ne fonctionne pas par élections, mais par héritage — du moins au CSV, le parti chrétien-social. La carrière politique commence au baptême, pendant que le tonton, la tata ou le beau-frère gardent le siège au chaud dans la Chambre pour la relève. Au CSV, la devise est: 1 fois élu, 3 fois transmis — carrousel de mandats en cercle familial.

▲ L’arbre généalogique du pouvoir : un mandat s’hérite, se conserve, se recycle.
▲ L’arbre généalogique du pouvoir : un mandat s’hérite, se conserve, se recycle.

L’éditorial du Wort du 4 juillet 2025 ressemblait encore une fois à un sermon dominical – cette fois-ci sur le thème central: les familles à la Chambre? Il était question d’équité, de justice, de dynasties politiques et de conflits d’intérêts, apparemment conformes à la Constitution. Bravo. Mais pendant que la rédactrice en chef fait le compte des combinaisons familiales, elle ignore le vrai nœud du problème, essentiel pour le Grand-Duché: les relations, les connaissances et les carnets de contacts bien garnis – et non la fidélité à la Constitution.

Car la question n’est pas seulement celle de l’existence de dynasties politiques, mais de savoir qui en profite – et qui est commodément oublié dans l’édito. Le CSV, monument politique et club généalogique par excellence, a vu sa liste dynastique traitée dans le Luxemburger Wort avec la discrétion d’un don glissé dans le tronc lors d’un vin d’honneur. Pas de Spautz, pas de Wolter, ni de Wiseler, Hansen, Kemp, Margue, Mischo ou Mosar – tous absents de l’article. La rédactrice préfère frapper sur l’ADR ou le LSAP, tout en occultant à quel point la CSV est enracinée dans le système.

LES Bonnes CONNEXIONS

Au Luxembourg, avoir le bon nom de famille ne suffit pas. Il faut le package complet:  

  • Le bon cabinet d’avocats  
  • Le bon cabinet de conseil – idéalement un des quatre apôtres du conseil, les Big Four  
  • Le bon siège dans un conseil d’administration  
  • Les bonnes alliances autour d’un verre d’honneur

Et le mieux, c’est d’avoir appris dès le parlement scolaire comment se faufiler dans les bureaux ministériels – sans jamais se présenter devant l’électeur.

L'ÉTAT CSV

Celui qui croit que, chez le CSV, seul le père transmet le mandat au fils, ne connaît pas le programme élargi. En 2021, l’affaire dite du cercle des amis ("Frëndeskrees-Affär") a révélé comment l’ancien président du parti avait construit une structure parallèle, innocemment déclarée en tant qu’association sans but lucratif sous le nom de «CSV Frëndeskrees» (Cercle des amis CSV) .

Cette affaire n’a pas seulement exposé le côté obscur d’un président de parti – elle a révélé le fonctionnement même de la politique luxembourgeoise: ceux qui ne sont pas dans le cercle des amis restent à la porte. L’affaire dépassait le simple incident juridique – elle montrait comment pouvoir, finances partisanes et réseaux personnels sont interconnectés. Le nom de l’ASBL «CSV-Cercle des amis» est devenu un symbole d’une politique hors programme officiel, menée en coulisses, perçue par beaucoup comme l’incarnation de l’État CSV.

Pendant que le public débat sur les dynasties familiales, le vrai jeu se joue à huis clos.

LE « C » DÉDOGMATISÉ

Évidemment, l’éditorialiste évoque le concept du panachage, notre joker national en matière de démocratie. Mais le fait que le système du panachage ne produit pas forcément de nouvelles têtes, mais plutôt les «populaires» du micro, de la mairie ou du sport, reste dans un brouillard non critiqué.

Et puis il y a ce bon vieux «C» dans le nom du CSV. D’après le nouveau Luc, le «C» ne représente plus le Christ, mais nos valeurs. Le «C» a donc été dédogmatisé et incarne désormais des valeurs aussi flexibles et négociables qu’une place sur la liste CSV. Pour flatter la fraction de la Fabrique d'Église, le curé Galles fut promptement mis sur les affiches électorales. Une fois élu, il a vite rangé la Bible et la miséricorde, pour se transformer en fidèle soldat du parti. Un véritable miracle social-chrétien.

NOUS AVONS BESOIN DE CLANS FAMILIAUX À la chambre

«Les clans familiaux hors de la Chambre?» Est-ce que la rédactrice en chef du Wort mesure bien ce qu’elle propose? Sans dynasties politiques bien structurées, il nous faudrait élire des politiciens vraiment compétents. Mais qui veut d’une Chambre pleine de députés qui écrivent eux-mêmes leurs discours ?

Les clans familiaux apportent la stabilité:  

  • Le père garde encore l’urne électorale originale de 1989 à la cave.  
  • Le fils a appris, dès l’enfance, à sourire en interview sans rien dire.  
  • La tante est stratégiquement placée à côté de la caisse du parti.  
  • Et le beau-frère s’occupe des questions parlementaires discutées préalablement dans le groupe familial WhatsApp.

Cette forme primitive de démocratie, tout comme le panachage, on ne va pas nous la gâcher. Elle fait partie du système luxembourgeois – sans elle, tout s’écroule.

La rédactrice compare le système politique à un club familial, mais ne dit mot du réseau d'une politique professionnelle bien ancrée dans l’économie. On discute arbres généalogiques pendant que, derrière des portes closes, les prochains mandats sont déjà distribués.

Conclusion? Le Luxembourg n’est pas seulement un micro-État, c’est un système planétaire miniature avec des trajectoires fixes. Ceux qui n’ont pas les bonnes coordonnées restent bloqués dans l’atmosphère politique. Ici, on ne vote pas – on attribue par droit familial

L'édito du Wort du 4 juillet 2025

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