· 

Sommet de l’OTAN: 5 % pour les armes

Les nouvelles priorités du Luxembourg : des chars plutôt que des retraites

«Le Luxembourg participera aux décisions sur les dépenses de défense en accord avec les 31 autres membres de l’OTAN», a déclaré le Premier ministre Luc Frieden lors de la conférence de presse suivant le Conseil de gouvernement, le 13 juin 2025. Bien avant le sommet, les États membres de l’OTAN s’étaient déjà entendus pour porter les contributions à 5% du PIB. 

Grâce à son armée de frontaliers, l’ancien ministre de la Défense Bausch avait négocié une petite exception à la sauce luxembourgeoise: pour le Grand-Duché, ce ne sera pas 5% du PIB – trop banal – mais bien du RNB (Revenu National Brut). Le pays donne l’exemple. Au lieu des 780 millions prévus au budget, on débourse 1,2 milliard d’euros, histoire d’arriver aux fameux 2%. Un petit calcul sans scrupule nous dit: pour atteindre 5%, il faudra aligner 3 milliards. À titre de comparaison : c’est quatre fois plus qu’auparavant – soit environ 10,5% du budget national ! On ose à peine imaginer ce qu’on pourrait faire avec tout cet argent… Rénover des écoles. Construire des logements sociaux. Lutter contre la pauvreté. Ou, folie douce, améliorer les prestations de santé.

Les 5%, bien sûr, ne concernent pas les États-Unis. Là-bas, on se la coule douce à 3,38% du PIB. Ironique? À peine. C’est plutôt un classique du genre : exiger des autres ce qu’on ne fait jamais soi-même. America first – toujours au premier rang pour donner des ordres, mais quand il faut passer à la caisse, c’est la rangée du fond.

Rutte met la pression

Le secrétaire général de l’OTAN, Mark Rutte, a résumé la situation avec élégance: «Si vous ne parvenez pas à atteindre les 5 %, vous pouvez garder vos systèmes de retraite et de santé – mais mieux vaut apprendre le russe

Ah bon. Alors tout est clair. Selon la logique rutto-atlantique, il faut désormais choisir entre sécurité sociale et prestige balistique. Les deux, apparemment, c’est trop demander.

Pour la population, les effets sont déjà visibles: la réforme des retraites suit son cours institutionnel, les salarié·es devront travailler plus longtemps pour toucher moins. Le nombre d’années de cotisation augmentera progressivement, sans revalorisation de la pension minimale. En parallèle, le troisième pilier – la retraite par capitalisation – est renforcé. Autrement dit: épargne si tu peux. Sinon, tant pis pour toi. Mais pour l’État, il faut en même temps mobiliser des milliards pour l’armement. Une affaire équitable – à condition de la vendre sur un stand de salon militaire, avec dégustation gratuite de cubes de fromage.

Le fonds qui sait tout faire – sauf sécuriser

En juin 2025, on apprend que le Fonds de compensation luxembourgeois (FDC), chargé des réserves de retraite, a décidé de réinvestir dans des entreprises d’armement comme Rheinmetall – bien sûr «après un examen éthique rigoureux», comme on le souligne. Rheinmetall figurait auparavant sur la liste noire, mais en a été retirée depuis que l’entreprise ne produirait plus de phosphore blanc. «Nous avons reçu l’assurance que le fonds ne suit pas une politique de militarisation générale», a déclaré Djuna Bernard, députée écologiste, au sujet du retour dans Rheinmetall. Rassurant.

Le Luxembourg ne devrait pas être «plus bête que les autres» en matière de dépenses militaires, a affirmé le ministre des Affaires étrangères Xavier Bettel le 16 juin sur RTL, en marge du Salon international de l’aéronautique et de l’espace au Bourget. Selon lui, il faut «veiller à en avoir un retour». Mais visiblement, le concept retours sur missiles ne tient pas toutes ses promesses.

Car malgré le sommet de l’OTAN et les fantasmes de réarmement, l’action de Rheinmetall est à la baisse depuis juin 2025. Après un record de plus de 1.900€, elle est redescendue autour de 1.670€, avec une glissade potentielle vers 1.500€. En cause: prises de bénéfices, instabilité géopolitique, et l’amère découverte que même les chars ont leurs limites… boursières.

Mais soyons justes: investir des fonds de pension dans des actions d’armement en chute libre témoigne d’un vrai courage et d’une prise de risque assumée. Les qualités qu’on attend en temps de guerre, non? Alors, c’est quoi le problème?

L’armement n’est pas un investissement – c’est l’emballage jetable le plus cher de l’Histoire

«Ce plan est un investissement dans notre défense et notre sécurité», a déclaré la ministre de la Défense Yuriko Backes le 12 juin 2024. Ah bon? Un char qui rouillera un jour est donc un investissement? Sur le plan économique, il s’agit plutôt d’une dépense de consommation : aucune création de valeur, aucun retour, juste de la rouille à propulsion explosive.

 

Pour mieux comprendre – version simplifiée:

🟩 Investissement: Tu achètes une maison. Elle prend de la valeur, tu peux y vivre ou la louer. → C’est un actif, ça rapporte.

🟩 Dépense de consommation: Tu réserves une croisière. Deux semaines plus tard, il te reste un coup de soleil, de bons souvenirs et un compte à sec. → Plaisir temporaire, argent évaporé.

🟩 Dépense militaire: L’État achète un missile – qu’il espère ne jamais devoir utiliser. Et s’il le fait, tout disparaît: l’argent, le missile… et quelqu’un d’autre. → Une seule étincelle, et zéro retour.

2035 – La date officielle de l’invasion russe ?

Selon les stratèges de l’OTAN et les têtes pensantes européennes, «le Russe» est déjà à nos portes – et l’attaque surviendra, c’est sûr, en 2028 ou 2029. Les signes sont là, disent-ils: intentions, signaux, visions de boule de cristal – il faut se préparer. Mais dans ce cas: pourquoi attendre jusqu’en 2035? Poutine a appelé? «Allô, l’OTAN? C’est Vlad. Pas de stress. Je vous attaque en 2035, quand vous serez prêts. Prenez votre temps avec les chars – ce serait injuste sinon, non?»

Ou alors, un Doodle a circulé au Kremlin pour fixer la meilleure date d’invasion? Petit problème logistique: mardi, la Roumanie n’a pas encore ses munitions. Jeudi, peut-être – mais seulement si le Luxembourg reçoit enfin la pièce de rechange pour son A400M.

Celui qui croit réellement à une attaque en 2028/2029, mais estime qu’on a jusqu’en 2035 pour se préparer, doit penser que Poutine attendra poliment… que tous les appels d’offres militaires soient validés et les autorisations environnementales délivrées.

Le sommet de l’ironie – le pacificateur à cravate rouge

Et pour couronner le tout? La cerise sur le missile: en fin de sommet, l’OTAN décide – non pas à l’unanimité, mais sous des applaudissements nourris – de décerner le prix Nobel de la paix à Donald Trump. Non parce qu’il aurait été nommé, mais parce que : «L’OTAN a décidé. Point.»

Luxembourg Jungle adresse ses plus sincères félicitations à Donald Trump pour son prochain prix Nobel de la paix. Comme il l’a lui-même déclaré, solennel, la main sur le pupitre, lors de son investiture du 20 janvier 2025: «Mon héritage le plus fier sera celui d’un artisan de paix et d’un rassembleur. C’est ce que je veux être : un artisan de paix et un rassembleur.»

Kommentar schreiben

Kommentare: 0